Je suis désolé, je m’ennuie déjà!

Les vendredis d’été, nous quittons notre petit appartement de 1350 pieds carrés en ville pour nous diriger sur le grand Kappa qui fait  96 pieds carré. Une routine s’est installée.  Puisque le bateau est situé sur le lac Champlain dans l’état de New York, nous devons d’abord passer la douane.  Ensuite, direction l’épicerie, le chargement et l’installation sur le bateau.  Finalement nous pouvons détacher les amarres et sommes prêt à quitter à temps pour le coucher du soleil. Nous quittons le quai pour nous diriger tout près de la marina où nous jetterons l’ancre pour la nuit.  Nous préparons un souper léger et rapidement, le ciel étoilé nous dirige vers notre lit.  Le lendemain matin débute la fin de semaine de voile.  Très tôt nous préparons un café et pendant que les petits matelots se font encore bercer par les vagues, le capitaine et moi levons les voiles pour nous diriger vers le sud.  À ce moment précis de la journée, nous sommes toujours pris d’un sentiment de dépassement et espérons toujours aller plus loin.  Évidemment nous savons pertinemment que nous pouvons difficilement connaître le lieu de notre mouillage pour la nuit puisque nous sommes dépendant des vents.  Le côté positif est que cela nous mène très souvent à de belles découvertes! Les matelots, une fois réveillés, passent la journée à s’imaginer à l’époque des pirates et des flibustiers.  Ils ouvrent les cartes marines du capitaine et indiquent les trésors à trouver dans une petite baie protégée des vents sud.  Tels de véritables navigateurs, ils indiquent la route à suivre selon la vitesse du vent et les obstacles à franchir.  Avec leurs jumelles, ils regardent les navires ennemis qui pourraient se diriger vers les trésors.  Des missiles imaginaires sont envoyés.  Une fois arrivé sur place, ils baissent les voiles selon les ordres du capitaine, jettent l’ancre et sautent à l’eau.  À ce moment précis, ils redeviennent des enfants du 21e siècle.  Ils s’amusent autour du voilier jusqu’à l’heure du souper.  Attention par contre! La beauté du voilier, c’est qu’il n’y a pas d’horloge!  Seul le soleil et le ventre qui gargouille peuvent nous indiquer l’heure du repas.  Le capitaine et sa seconde ouvrent une bouteille de vin et regardent le soleil se coucher sur le lac.  Voilà une première journée complète où le sommeil viendra rapidement.  Le lendemain, le lever se fait au même moment que le soleil.  Aucune alarme, aucun rideau.  Seuls sur le lac, nous avons l’impression d’être privilégié mais surtout très matinal!  Un vent doux nous pousse vers le nord pour retourner vers notre quai.  Sachant qu’à voiture il nous prendrait 30 minutes pour nous rendre, nous nous délectons de savoir qu’une journée entière sera nécessaire pour rentrer avec notre fidèle Kappa. Vers 10 heures, plusieurs bateaux se réveillent et l’on croise certains habitués.

En se dirigeant vers le nord, nous réalisons que nous nous éloignons du sud. Rien de nouveau dans cette constatation vous me direz.  Cependant, il est plus difficile de retourner vers le nord lorsque l’on croise des voiliers qui se dirigent vers le sud; le vrai sud.  Au mois de septembre et octobre, les bateaux se dirigent tranquillement vers New York pour ensuite passer une partie de l’hiver aux Bahamas.  Pour plusieurs il s’agit du début d’un long voyage.  Pour nous, la vue de ces voiliers nous permet de rêver  au jour où ce sera notre tour.

 

Rapidement, le temps de la sortie de l’eau arrive et le bateau doit sortir de son état naturel.  Hors de l’eau et installé sur un support de métal, il semble triste, comme nous.  L’hiver sera long.  Il nous permettra de nous imaginer l’été suivant.  Il permet également de nous faire rêver, songer à ce fameux voyage vers le sud.